Ardalén

"Les souvenirs, qui sont déjà très nombreux, vont et viennent, sans que je puisse toujours les situer. Je ne suis jamais sûr de ce qui s'est passé avant ou après, tout tourne : les noms, les visages... C'est un peu comme si le livre de ma vie là-bas s'était défait et que j'en avais gardé une poignée de feuilles froissées dans les mains que je n'arrive plus à mettre dans l'ordre. Parfois, c'est presque comme si ces souvenirs ne m'appartenaient pas. Je ne suis même pas certain de faire la différence entre ce que j'imagine et ce dont je me souviens...."

Nous sommes faits de nos souvenirs, mais la mémoire n'est pas une archive objective et inaltérable. Sabela essaye de reconstruire une histoire, une part de son histoire, à travers les récits de Fidel. Mais d'autres fils viennent tisser cette toile dans le processus de reconstruction de l'histoire : d'autres personnes, d'autres mémoires. Car en réalité nous sommes aussi faits des souvenirs que les autres ont de nous.
Et dans tous ces souvenirs, ceux qui nous sont propres comme ceux des autres, il y a de l'amour et de la tendresse, des rancœurs et des haines.

C'est pour cela que le souvenir n'est pas sans danger. Mais celui qui n'a pas de mémoire, n'a pas non plus de vie.